Saint Jean-Paul II crée Cardinal le futur Pape François |
Servir l'unité de l'Eglise, vocation des cardinaux
Allocutions à l'angélus
Paroles du pape François avant l’angélus
Chers frères et soeurs, bonjour!
Dans la deuxième lecture de ce dimanche, saint Paul affirme
: « Il ne faut pas mettre sa fierté en tel ou tel homme. Car tout vous
appartient, que ce soit Paul, Apollos, Céphas [c’est-à-dire Pierre], le monde,
la vie, la mort, le présent, l’avenir : tout est à vous, mais vous, vous êtes
au Christ, et le Christ est à Dieu » (1Co 3,23). Pourquoi l’apôtre dit-il cela
? Parce que le problème que l’apôtre doit affronter est celui des divisions
dans la communauté de Corinthe, dans laquelle s’étaient formés des groupes qui
se référaient à différents prédicateurs qu’ils considéraient comme leurs chefs.
Ils disaient : « « Moi, j’appartiens à Paul », « Moi, j’appartiens à Apollos »,
« Moi, j’appartiens à Pierre » » (1, 12). Saint Paul explique que cette façon
de penser est erronée parce que la communauté n’appartient pas aux apôtres,
mais ce sont eux – les apôtres – qui appartiennent à la communauté ; mais la
communauté, tout entière, appartient au Christ !
Il découle de cette appartenance que, dans les communautés
chrétiennes – diocèses, paroisses, associations, mouvements -, les différences
ne peuvent pas contredire le fait que nous tous, par le baptême, nous avons la
même dignité : tous, en Jésus-Christ, nous sommes enfants de Dieu. Et c’est là
notre dignité : en Jésus-Christ, nous sommes enfants de Dieu ! Ceux qui ont
reçu un ministère de guide, de prédication, d’administration des sacrements, ne
doivent pas se considérer comme les propriétaires de pouvoir spéciaux, comme
des patrons, mais se mettre au service de la communauté, en l’aidant à
parcourir avec joie le chemin de la sainteté.
L’Eglise confie aujourd’hui le témoignage de ce style de vie
pastorale aux nouveaux cardinaux, avec lesquels j’ai célébré la sainte messe ce
matin. Nous pouvons saluer les nouveaux cardinaux par des applaudissements.
Nous les saluons tous ! Le consistoire d’hier et la célébration eucharistique
d’aujourd’hui nous ont offert une occasion précieuse pour faire l’expérience de
la catholicité, de l’universalité de l’Eglise, bien représentée par les
origines variées des membres du Collège cardinalice, rassemblés en étroite
communion autour du Successeur de Pierre. Et que le Seigneur nous donne la
grâce de travailler pour l’unité de l’Eglise, de construire cette unité, parce
que l’unité est plus importante que les conflits ! L’unité de l’Eglise est du
Christ, les conflits sont des problèmes qui ne sont pas toujours du Christ…
Que les moments liturgiques et de fête, que nous avons eu l’occasion
de vivre au cours de ces deux derniers jours, fortifient en nous tous la foi,
l’amour du Christ et de son Eglise ! Je vous invite aussi à soutenir ces
pasteurs et de les aider de votre prière afin qu’ils guident toujours avec zèle
le peuple qui leur a été confié, en manifestant à tous la tendresse et l’amour
du Seigneur. Mais combien un évêque, un cardinal, un pape a besoin de prière
afin de pouvoir aider le Peuple de Dieu à avancer !
Je dis « aider », c’est-à-dire servir le Peuple de Dieu,
parce que la vocation de l’évêque, du cardinal et du pape est justement d’être
serviteur, de servir au nom du Christ. Priez pour nous, afin qu’ils soient de
bons serviteurs : de bons serviteurs, pas de bons patrons ! Tous ensemble,
évêques, prêtres, personnes consacrées et fidèles laïcs, nous devons offrir le
témoignage d’une Eglise fidèle au Christ, animée par le désir de servir ses
frères et prête à répondre, avec un courage prophétique, aux attentes et aux
exigences spirituelles des hommes et des femmes de notre temps. Que la Vierge
Marie nous accompagne et nous protège sur ce chemin.
Paroles du pape François après l’angélus
Je salue tous les pèlerins présents, en particulier ceux qui
sont venus à l’occasion du consistoire pour accompagner les nouveaux cardinaux,
et je remercie beaucoup les pays qui ont voulu être présents à cet événement
par des délégations officielles.
Je salue les étudiants de Toulouse et la communauté des
Vénézuéliens résidant en Italie.
Je salue les fidèles de Caltanissetta, Reggio Calabria,
Sortino, Altamura, Ruvo et Lido degli Estensi; les jeunes de Reggio Emilia et
ceux du diocèse de Lodi; l’Association cycliste d’Agrigente, et les bénévoles
de la Protection civile de la Bassa Padovana. A tous, bon dimanche et bon déjeuner. Au-revoir !
Messe avec les nouveaux cardinaux: cultiver la docilité à
l'Esprit Saint
"Le Cardinal entre dans l'Eglise de Rome, pas dans une cour"
Homélie du pape François
« Que ton aide, Père miséricordieux, nous rende toujours
attentifs à la voix de l’Esprit » (Collecte)
Cette prière, prononcée au début de la Messe, nous appelle à
une attitude fondamentale : l’écoute de l’Esprit Saint, qui vivifie l’Église et
l’anime. Par sa force créatrice et rénovatrice, l’Esprit soutient toujours
l’espérance du Peuple de Dieu en marche dans l’histoire, et soutient toujours,
comme Paraclet, le témoignage des chrétiens. En ce moment, nous tous, avec les
nouveaux Cardinaux, nous voulons écouter la voix de l’Esprit qui parle à
travers les Écritures proclamées.
Dans la première Lecture a résonné l’appel du Seigneur à son
peuple : « Soyez saints, car moi, le Seigneur votre Dieu, je suis saint » (Lv
19, 2). Et Jésus dans l’Évangile rappelle : « Vous donc, soyez parfaits comme
votre Père céleste est parfait » (Mt 5, 48). Ces paroles nous interpellent
tous, disciples du Seigneur ; et aujourd’hui, elles sont adressées spécialement
à moi et à vous, chers frères Cardinaux, d’une manière particulière à vous qui
êtes entrés hier dans le Collège cardinalice. Imiter la sainteté et la
perfection de Dieu peut sembler un but inaccessible. Cependant, la première
Lecture et l’Évangile suggèrent des exemples concrets afin que le comportement
de Dieu devienne la règle de notre agir. Mais rappelons-nous tous,
rappelons-nous que sans l’Esprit Saint, notre effort serait vain ! La sainteté
chrétienne n’est pas avant tout notre œuvre, mais elle est le fruit de la
docilité – voulue et cultivée – à l’Esprit de Dieu trois fois Saint.
Le Lévitique dit : « Tu ne haïras pas ton frère dans ton
cœur… Tu ne te vengeras pas et tu ne garderas pas de rancune… mais tu aimeras
ton prochain… » (19, 17-18). Ces attitudes naissent de la sainteté de Dieu.
Nous au contraire habituellement nous sommes si différents, si égoïstes et
orgueilleux… pourtant la bonté et la beauté de Dieu nous attirent, et l’Esprit
Saint peut nous purifier, il peut nous transformer, il peut nous modeler jour
après jour. Faire ce travail de conversion, conversion du cœur, conversion que
nous tous –spécialement vous Cardinaux, et moi – nous devons faire. Conversion
!
Dans l’Évangile, Jésus aussi nous parle de la sainteté et
nous explique la loi nouvelle, la sienne. Il le fait au moyen de quelques
antithèses entre la justice imparfaite des scribes et des pharisiens et la
justice supérieure du Royaume de Dieu. La première antithèse du passage
d’aujourd’hui concerne la vengeance. « Vous avez appris qu’il a été dit :
"Œil pour œil, dent pour dent". Eh bien ! moi, je vous dis : … si
quelqu’un te gifle sur la joue droite, tends-lui encore l’autre » (Mt 5,
38-39). Non seulement nous ne devons pas rendre à l’autre le mal qu’il nous a
fait, mais nous devons nous efforcer de faire le bien avec largesse.
La seconde antithèse fait référence aux ennemis : « Vous
avez appris qu’il a été dit : "Tu aimeras ton prochain et tu haïras ton
ennemi". Eh bien ! moi, je vous dis : Aimez vos ennemis, et priez pour
ceux qui vous persécutent » (v. 43-44). À celui qui veut le suivre, Jésus demande
d’aimer celui que ne le mérite pas, sans contrepartie, pour combler les vides
d’amour qu’il y a dans les cœurs, dans les relations humaines, dans les
familles, dans les communautés et dans le monde. Frères Cardinaux, Jésus n’est
pas venu pour nous enseigner les bonnes manières, des manières de salon ! Pour
cela il n’y avait pas besoin qu’il descende du ciel et meure sur la Croix. Le
Christ est venu pour nous sauver, pour nous montrer le chemin, l’unique chemin
de sortie des sables mouvants du péché, et ce chemin de sainteté c’est la
miséricorde, chemin qu’il a fait et qu’il fait avec nous chaque jour. Être
saints n’est pas un luxe, c’est nécessaire pour le salut du monde. C’est ce que
le Seigneur nous demande.
Chers frères Cardinaux, le Seigneur Jésus et notre Mère
l’Église nous demandent de témoigner avec beaucoup de zèle et d’ardeur de ces
attitudes de sainteté. La sainteté d’un Cardinal consiste vraiment en ce
supplément d’oblativité gratuite. Par conséquent, aimons ceux qui nous sont
hostiles ; bénissons celui qui dit du mal de nous ; saluons d’un sourire celui
qui peut-être ne le mérite pas ; n’aspirons pas à nous faire valoir, mais
opposons la douceur à la tyrannie ; oublions les humiliations subies.
Laissons-nous toujours guider par l’Esprit du Christ, qui s’est sacrifié
lui-même sur la croix, pour que nous puissions être des "canaux" par
lesquels s’écoule sa charité. C’est l’attitude, ce doit être la conduite d’un
Cardinal. Le Cardinal – je le dis spécialement à vous - entre dans l’Église de
Rome, frères, il n’entre pas dans une cour. Tous évitons et entraidons-nous
pour éviter des habitudes et des comportements de cour : intrigues, bavardages,
cercles, favoritismes, préférences. Que notre langage soit celui de l’Évangile
: "oui, oui; non, non"; nos attitudes celles des Béatitudes, et notre
route celle de la sainteté. Prions de nouveau : « Que ton aide, Père
miséricordieux, nous rende toujours attentifs à la voix de l’Esprit ».
L’Esprit Saint nous parle aujourd’hui aussi à travers les
paroles de saint Paul : « Vous êtes le temple de Dieu… le temple de Dieu est
sacré, et ce temple c’est vous » (1 Co 3, 16-17). Dans ce temple, que nous
sommes, se célèbre une liturgie existentielle : celle de la bonté, du pardon,
du service, en un mot, la liturgie de l’amour. Notre temple est comme profané
si nous négligeons nos devoirs envers le prochain. Quand dans notre cœur le
plus petit de nos frères trouve place, c’est Dieu lui-même qui y trouve place.
Quand ce frère est laissé dehors, c’est Dieu lui-même qui n’est pas accueilli.
Un cœur vide d’amour est comme une église désaffectée, soustraite au service
divin et destinée à un autre.
Chers frères Cardinaux, restons unis dans le Christ et entre
nous ! Je vous demande de me demeurer proche, par la prière, le conseil, la
collaboration. Et vous tous, évêques, prêtres, diacres, personnes consacrées et
laïcs, unissez-vous dans l’invocation de l’Esprit Saint, afin que le Collège
des Cardinaux soit toujours plus ardent de charité pastorale, davantage rempli
de sainteté, pour servir l’Évangile et aider l’Église à rayonner l’amour du
Christ dans le monde.
"L'Eglise a besoin de votre communion", dit le
pape aux cardinaux
Consistoire pour la création de 19 cardinaux
Homélie du pape François
« Jésus marchait devant eux… » (Mc 10,32).
Jésus marche devant nous aussi, en ce moment. Il est
toujours devant nous. Il nous précède et nous ouvre la voie… Et c’est notre
confiance et notre joie : être ses disciples, demeurer avec lui, marcher
derrière lui, le suivre…
Quand nous avons célébré ensemble la première Messe dans la
Chapelle Sixtine, « marcher » a été la première parole que le Seigneur nous a
proposée : marcher, et ensuite construire et confesser.
Aujourd’hui cette parole revient, mais comme un acte, comme
l’action de Jésus qui continue: « Jésus marchait… ». Cela nous frappe dans les
Évangiles : Jésus marche beaucoup, il instruit les siens au long du chemin.
C’est important. Jésus n’est pas venu pour enseigner une philosophie, une
idéologie… mais une « voie », une route à parcourir avec lui, et la route
s’apprend en la faisant, en marchant. Oui, chers Frères, voilà notre joie :
marcher avec Jésus.
Mais ce n’est pas facile, ce n’est pas confortable, parce
que la route que Jésus choisit est celle de la Croix. Alors qu’ils sont en
chemin, il parle à ses disciples de ce qui va arriver à Jérusalem : il annonce
sa passion, sa mort et sa résurrection. Alors ils sont « stupéfaits » et «
remplis de crainte ». Stupéfaits, bien sûr, parce que, pour eux, monter à
Jérusalem voulait dire participer au triomphe du Messie, à sa victoire – on le
voit ensuite dans la demande de Jacques et de Jean ; et remplis de crainte pour
ce que Jésus allait devoir subir, et aussi pour ce que eux risquaient de subir.
A la différence des disciples d’alors, nous savons que Jésus
a vaincu, et nous ne devrions pas avoir peur de la Croix ; bien plus, dans la
Croix nous avons notre espérance. Cependant, nous sommes nous aussi humains,
pécheurs, et nous sommes exposés à la tentation de penser à la manière des
hommes et non de Dieu.
Et quand on pense à la manière du monde, quel est la
conséquence ? « Les dix autres se mirent à s’indigner contre Jacques et Jean »
(v. 41). Ils s’indignent. Si la mentalité du monde prend le dessus, surgissent
les rivalités, les jalousies, les factions …
Alors, cette parole que le Seigneur nous adresse aujourd’hui
est très salutaire ! Elle nous purifie intérieurement, elle fait la lumière
dans nos consciences, elle nous aide à nous mettre pleinement en accord avec
Jésus, et à le faire ensemble, au moment où le Collège des Cardinaux s’agrandit
par l’entrée de nouveaux membres.
« Jésus les appela près de lui… » (Mc 10,42). Voici l’autre
geste du Seigneur. Le long du chemin, il se rend compte qu’il y a besoin de
parler aux douze, il s’arrête et les appelle à lui. Frères, laissons le
Seigneur Jésus nous appeler à lui ! Laissons-nous convoquer par lui. Et
écoutons-le, dans la joie d’accueillir ensemble sa Parole, de nous laisser
instruire par elle et par le Saint Esprit, pour devenir toujours plus un seul
cœur et une seule âme, autour de lui.
Et alors que nous sommes ainsi convoqués, « appelés près de
lui » par notre unique Maître, moi aussi je vous dis ce dont l’Église a besoin
: elle a besoin de vous, de votre collaboration, et plus encore de votre
communion, communion avec moi et entre vous. L’Église a besoin de votre
courage, pour annoncer l’Évangile en toute occasion, opportune ou inopportune,
et pour rendre témoignage à la vérité.
L’Église a besoin de votre prière pour le bon cheminement du
troupeau du Christ, la prière qui, avec l’annonce de la Parole, est la première
tâche de l’Évêque. L’Église a besoin de votre compassion surtout en ce moment
de douleur et de souffrance dans de nombreux pays du monde. Nous voulons
exprimer notre proximité spirituelle à toutes les communautés ecclésiales et à
tous les chrétiens qui souffrent de discriminations et de persécutions.
L’Église a besoin de notre prière pour eux, afin qu’ils soient forts dans la
foi et qu’ils sachent réagir au mal par le bien. Et notre prière s’étend à tout
homme et à toute femme qui subit l’injustice à cause de ses convictions
religieuses.
L’Église a besoin de nous aussi pour que nous soyons des
hommes de paix et fassions la paix par nos œuvres, nos désirs, nos prières :
pour cela invoquons la paix et la réconciliation pour les peuples qui en ces
temps sont éprouvés par la violence et par la guerre.
Merci, Frères très chers ! Marchons ensemble derrière le
Seigneur, et laissons-nous toujours davantage convoquer par lui, au milieu du
peuple fidèle, de la sainte Mère Église.